Suzane : « Prendre la parole et arrêter de serrer les dents !»

La conteuse d’histoires vraies sur fond d’électro chante et danse à la Tannerie de Bourg ce vendredi 15 novembre. L’insatisfaction, les rêves entravés, l’homosexualité esquissée, le harcèlement, la flemme, la liberté et la féminité sous toutes ses facettes. Libre échange avec une femme de caractère.
Suzane en garde dans sa combinaison inspirée par Bruce Lee/Photo Pierre FLORENT.

C’est un conte de fée – traduisez « success-story » en Macronien – comme aime se la raconter le métier. Celle d’Océane Colom, née il y a 29 ans en Avignon dans une fratrie de quatre enfants. Classe moyenne. Grand-père, chanteur d’opéra. Signe particulier : un « Z » qui veut dire Suzane, prénom emprunté à son arrière-grand-mère. « Une femme de caractère, libre ». Comme elle.

/Photo Pierre FLORENT

Pendant quinze ans, Suzane donc, se forge un mental et un corps en mouvement à la dure école de la danse. Elle la plaque vers 18 ans pour monter à Paris. La voici serveuse de bistrot, poste d’observation privilégié de la condition humaine qu’elle chronique en griffonnant des notes sur une nappe de restaurant. Oui, comme Dutronc. Elle lui préfère Brel, Barbara ou Piaf, qu’elle chante en essuyant les verres au fond du café, forcément.

Quand elle a fini son service, elle s’étourdit en club sur des beats qui tabassent. Son art singulier vient de ce télescopage entre chanson française et électro. Il vient aux oreilles d’un jeune producteur. Bingo. En quelques clips et des millions de vue, Suzane cartonne. Part en tournée internationale et affole les festivals de l’été, seule en scène avec ses machines et ses chorégraphies, sanglée dans sa combinaison inspirée dit-elle de Bruce Lee, d’Elvis et… de Louis XIV pour le bleu-roi !

Celle qui se définit comme « une conteuse d’histoires vraies sur fond d’électro » raconte la sienne dans des titres clips et chocs. L’insatisfaction, les rêves entravés, l’homosexualité esquissée, le harcèlement, la flemme, la liberté… Tout est dit en quelques traits cinglants, d’une justesse remarquable. On pense très fort à Stromae ou à Eddy de Pretto. Références superflues. Elle, c’est Suzane et c’est déjà énorme.

Comment êtes-vous passée de la danse classique à l’électro ?

C’est un long chemin. La danse sous toutes ses formes, classique, contemporaine, jazz, est mon premier amour. Mais elle suppose beaucoup de rigueur et de pression. C’est quelque chose qui m’étouffait. Vers 17 ans, j’ai arrêté. J’ai troqué la barre des salles de danse contre le sol des clubs, la musique classique pure et dure contre l’électro. C’est une période où l’on me retrouvait souvent sur le dance-floor…

La danse reste très présente sur scène et dans vos clips…

Tout à fait. J’aime beaucoup chorégraphier les clips et improviser sur scène. C’est la danse qui donne cette énergie.

Si je vous dis : « Aujourd’hui t’es ravissante, j’aimerais t’inviter à dîner un soir où ma femme est absente… » Vous le prenez comment ?

Dis comme ça, ça fait drôle ! Je suis heureuse que vous citiez cette chanson (NDLR : SLT). J’exprime la violence des mots sur une femme, dans la rue, au travail, sur Internet. Ce message me tenait à cœur. Je flippais un peu, mais il a été très bien reçu.

Les agressions sexuelles, les insultes, vous vivez ça « trois fois par journée »?

Malheureusement oui, c’est ce que vivent beaucoup de femmes.

Qui se disent « Souffle, serre les dents » et se taisent…

C’est le problème. Non, il faut prendre la parole et se battre, pas seulement les femmes, les hommes aussi. Une mère doit dire à sa fille « défends-toi », lui donner envie d’apprendre au moins. Peut-être qu’on y arrivera, à force de multiplier les prises de parole. J’ai l’impression que le sujet reste tabou. Mais sait-on jamais.

« Croire en ses rêves, se donner le temps de vivre »

Vous avez « La flemme » ?

Comme tout le monde. Le monde tourne extrêmement vite. La flemme est une façon de dire non et de s’accorder deux minutes pour penser.

…Pour rêver ? N’en déplaise à ceux qui vous disent que « c’est bien beau de rêver Suzane, mais tu n’as plus huit ans ».

Croire en ses rêves, se donner le temps de vivre, on est toujours dans une quête de liberté.

La mélancolie de l’insatisfait à vie, c’est une maladie ?

Un sentiment très présent.

La solitude d’Anouchka qui passe sans regarder les garçons, l’homosexualité esquissée ?

La liberté d’être soi. J’avais envie de raconter cette histoire en laissant planer le doute. De montrer la féminité sous ses différentes facettes.

Electrochoc à la Tannerie

La plus belle date de l’automne, ce vendredi 15 novembre à la Tannerie ? Pas loin. Suzane, c’est la sensation du rayon chanson et musiques urbaines, un électrochoc de l’ampleur des secousses ressenties avec Orelsan, Stromae ou Eddy de Pretto. Seule en scène, elle chante et danse ses histoires vraies sur fond d’électro avec une énergie époustouflante. Grosse claque vraiment. Suzane jouera ses titres/clips qui buzzent, dont le récent Il est où le SAV ? quand on a cassé la planète, ainsi que les premiers jets d’un album à paraître en janvier.

Suzane + Parka Valentine. Vendredi 15 novembre, 20h30, Tannerie de Bourg. 14 €.

Dark Mazy

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