Jok’Air conditionné ou Joker’Air max ?

Points de vue croisés sur le concert de Jok’Air ce vendredi 13 décembre à la Tannerie de Bourg. Le rockeur à l’ancienne dézingue les roucoulades du rappeur de charme. L’adolescent de son temps adore l’ambiance de « ouf » qui file un méchant coup de vieux à ses parents.

Houla, on n’aurait pas un peu vieilli ces derniers temps ? La question taraude le rockeur du siècle dernier en voyant l’interminable file d’adolescents (dont trois-quarts d’adolescentes) qui s’étire devant la Tannerie de Bourg ce vendredi. Le mobile de cette mobilisation lycéenne ? Jok’Air, le rappeur qui affole YouTube et les jeunes filles en fleur.

Crock’n’roll ! Chattos croque l’actu du rock’n’roll

Agglutinés aux premiers rangs

« Ce soir, vous êtes 5,994 millions !» fake celui qui entend candidater à l’Elysée, et semble bien parti pour. Plutôt 600 spectateurs/trices selon les organisateurs, soit une Tannerie archi-comble. On s’attend à progresser en mode commando à travers la marée humaine. Mais non. Reste plein d’espace derrière et sur les côtés. C’est qu’ils sont fins et affûtés comme des javelots ces p… d’ados ! Différence notable avec les anciens qui tiennent à préserver leur zone de confort, ils s’agglutinent aux premiers rangs pour fusionner en un magma éruptif. En termes d’entrées, un quinqua égale deux 15/20 ans. Bon à savoir pour ajuster la billetterie.

Autre surprise, le bar est facilement accessible. Pas question de compter sur la buvette pour arrondir la recette, alors qu’elle peut la doubler dans un concert de rock à l’ancienne. Souvent mineurs et désargentés, les jeunes boivent peu (pas assez d’ailleurs si l’on en juge par le nombre de coups de chaud) et restent sagement dans la salle.

Rap en LV1

Pour voir qui déjà ? En ouverture, Zamdane, rappeur originaire de Marrakech + un MC + un DJ. Bien « trappu », à la fois musical et rentre-dedans. Pas mal. En une demi-heure, le trio met le feu à un parterre hautement combustible. Largué, l’ancien ne saisit un traître mot de cette LV1 qu’est devenu le rap.

Gentil Jok’Air

Avec Jok’Air, il comprend mieux, hélas, même si la voix dévoile des faiblesses criantes sans le cache-misère de l’auto-tune. Côté paroles et musiques, le featuring de quatre rappeurs (dont le sémillant Shish) a musclé le propos sur trois morceaux. Sinon, en dépit d’inoffensives saillies sur le sexe, malgré ses références Gansgster & Gentleman, Jok’Travolta, Jok’Rambo et autres Big Daddy, Jok’Air (conditionné) roucoule de l’eau de rose. Nombre de textes ne dépareilleraient pas dans le répertoire des chanteurs de charme des années 70/80 (Mike Brant, Frédéric François, Frank Michael…) qui plaisent tant à ma mère. Rien de neuf sous le soleil de la variété française. Seuls changent le look et le beat.

Energie vitale

Photos Marc DAZY

L’ancien s’amuse aussi des tics du rappeur, de ce besoin de s’inquiéter de la santé des gens toutes les cinq minutes (« ça va toujours ? Est-ce que vous êtes chauds ? »), de les inciter à « faire du bruit » à chaque instant, ou de s’enquérir « est-ce que vous êtes là ?» Ben oui, où veut-il qu’on soit ?

N’empêche. Jok’Air fait le job et il le fait bien. Généreux, sympa comme tout, en communion totale avec son public qu’il prend par la main, selfie, invite sur scène, offre mots d’amour et dédicaces. Le public le lui rend bien. Il passe dans ce concert une énergie, une spontanéité, un enthousiasme, une fureur de vivre que l’ancien peine à retrouver dans le rock. Jok’Air vient de lui filer un méchant coup de vieux, et c’est tant mieux.

Dark MAZY

Waouh ! Mon premier vrai concert de rap

Même lieu, même heure, autre point de vue. Le rockambolesque Dark Mazy m’a sollicité pour jouer le moderne et lui l’ancien. C’est qu’il commence à se faire vieux pour du rap… Mais ne le répétez pas, parait qu’il se montre un peu irascible parfois.

Dans le vif du sujet

Bref. Jok’air et Zamdane hier à la Tannerie, avec pour objectif de mettre le feu. Mon premier vrai concert de rap dans une ambiance de « ouf ». Après une grosse demi-heure de queue, on rentre et on se place au milieu de la fosse, de la masse grouillante de monde et d’une effervescence palpable. Quelque 600 fans et surtout fanes trépignent déjà d’impatience avant l’arrivée de Zamdane. Le rappeur de Marrakech rentre directement dans le vif du sujet sur un set d’environ 45 minutes, qui me donne l’impression de n’en faire que 8.  

/Photo Marc DAZY

Et puis Jok’Air arrive. Je ne sais comment, mais on se retrouve, mes potes et moi catapultés devant, à deux doigts de toucher le rappeur. Waouh ! On suffoque, la chaleur est infernale, tous serrés les uns contre les autres pour accueillir Big Daddy Jok.

A deux doigts de toucher le rappeur/Photo Marc DAZY

Ça saute, ça danse, ça slame et ça pogote !

Déjà bouillante, la foule compactée sur vingt mètres carrés explose à son arrivée. Les 23 titres, les plus connus bien sûr, nous transcendent. Des filles électriques partout, certaines hurlent et certifient que Jok’Air est l’homme de leur vie, d’autres tombent dans les pommes.  L’un monte sur les épaules de l’autre pour avoir une vue imprenable sur les belles dreads de l’artiste. Les gens brandissent des pancartes à son effigie. Ça saute, ça danse, ça slame et ça pogote. 5,994 millions de portables (chiffre officiel) flashent pleins feux. Un véritable remake de Star Wars !

/Photos Marc DAZY

Les morceaux s’enchaînent vite et surtout bien. Du turn-up avec le titre du même nom. Des morceaux plus posés comme le célébrissime “Las Vegas” ou d’autres qui bastonnent, tel l’emblématique “Mon survet”, dans « la fièvre » non pas du samedi mais du vendredi soir. Une amie à moi, a même le privilège de monter sur scène au rappel, la chanceuse !

Un gangster-gentleman burgien

Tout ça entre deux débats existentiels, genre pain chocolat ou chocolatine au p’tit déj’ ? (ceux qui ont répondu chocolatine sont priés de quitter le site ad vitam eternam), et les céréales, avant ou après le lait ?  De grands sujets de société qui rapprochent Jok’Travolta de ses fans. A quelques rangs de lui, on a vraiment l’impression d’être en face d’un gars du coin, un gangster-gentleman burgien, ou peut-être de Viriat à la réflexion. 

/Photo Marc DAZY

Tout le monde n’aime pas la voix sucrée et les textes parfois pimentés de Jok’Air. Moi, j’ai adoré le concert pour son ambiance, n’en déplaise à ce vieux grincheux de Dark Mazy !

Louis DAZY 

Dark Mazy

3 réflexions sur « Jok’Air conditionné ou Joker’Air max ? »

    1. Merci, trop cool ma Tatoo ! C’est vrai qu’il m’a un peu bluffé, le jeune padawan, sur ce coup-là. Une initiative qu’on devrait prendre plus souvent. Bises

  1. En voilà une bonne idée que de croiser deux regards générationnels ! En tout cas, bravo au fiston pour la qualité de sa rédac’, faut dire qu’il a de qui (bien) tenir le pti Louis, ça promet ! Mais respect au daron qui m’a fait mourir de rire et qui doit se douter pourquoi…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Revenir en haut de page