Ce mardi 28 janvier au Théâtre de Bourg, Zone Libre et Marc Nammour mettent en musiques improvisées les mots du poète antillais. La verticalité, la dignité pour briser les liens qui asservissent. Un humanisme actif, terriblement d’actualité résume le guitariste Serge Teyssot-Gay.
« Une colère créatrice ». Serge Teyssot-Gay nomme ainsi l’énergie qui jaillit de l’œuvre d’Aimé Césaire (1913-2008). Dans Cahier d’un retour au Pays natal (1939), le poète martiniquais fonde le concept de négritude. Du cri de rage contre l’abjection du colonialisme naît le sentiment d’appartenir à la race des opprimés, une prise de conscience de la différence et un humanisme actif. « La conquête d’une nouvelle et large fraternité » comme l’écrit Césaire.
Poésie et jaillissement volcanique
« Qu’est-ce que je peux faire pour traduire cette philosophie en musique ?» s’interroge Teyssot-Gay. La question vient à lui en 2012, lorsque le festival toulousain Le Marathon des mots le sollicite pour monter un projet autour des cent ans de la naissance de Césaire. « On parle de poésie et de jaillissement volcanique. Pour respecter au mieux cette pensée, pour rendre cette puissance incroyable, quoi de mieux que Zone Libre ?»
Zone Libre, c’est le tandem que l’ancien guitariste de Noir Désir forme avec le batteur Cyril Bilbeaud (Sloy, Théo Akola…) depuis une dizaine d’années. Signe particulier : ce duo très aguerri improvise librement en ciné-concerts sur Nosferatu, Dr Jekyll & Mr Hyde ou 2001, l’Odyssée de l’espace.
« Pour le texte de Césaire, il fallait un interprète de façon à ce que je puisse me consacrer à la musique à 100% ». Donc Marc Nammour, le poète slameur de La Canaille et de Zone libre Polyurbaine, version rap, rock et groove de Zone Libre. « Il est complètement admiratif de cet écrivain, notamment de Cahier d’un retour au pays natal. C’est lui qui l’a choisi ».
Serge Teyssot-Gay lui donne toutefois d’un cahier des charges en trois points. « Un découpage de moins d’une heure. Ménager trois rendez-vous instrumentaux qui libèrent l’auditeur d’un texte très dense. Et puis ne jamais répéter !» Marc Nammour accepte le deal. Le trio interprète Aimé Césaire pour la première fois en 2013 au Havre, lors d’une carte blanche offerte par le festival Le goût des autres .
Et c’est fulgurant. La guitare boule de nerf de Teyssot-Gay réagit aux impulsions vocales de Nammour, qui rebondit sur les riffs, chorus et soli, qui percutent sur les frappes de batterie etc… Un jeu d’improvisations parfaitement emboîtées et jamais gratuites.
Debout contre les oppressions
Le spectacle s’intitule Debout dans les cordages. La verticalité, la dignité pour briser les liens qui asservissent. « Les cordes peuvent venir des autres ou de nous-mêmes. Debout… renvoie à la colère émancipatrice de toutes les oppressions. La poésie de Césaire est terriblement actuelle. Elle résonne à fond sur toute la planète face à un ennemi totalement identifié, le libéralisme et sa société de castes complètement corrompue ».
Debout dans les cordages. La bande son des sans-voix. Mardi 28 janvier, 20h00, Théâtre de Bourg-en-Bresse. 16/18/22€.
En direct sur Radio B. Marc Nammour sera l’invité d’une émission enregistrée en public et en direct sur Radio B, 90.00. Mardi 28 janvier, 18h00. Entrée libre