Le rappeur burgien MC Jo Hell vient de publier un nouveau clip. Capté dans le grand vide du Théâtre de Bourg-en-Bresse, il dit tout du naufrage des artistes et de l’échouage des spectacles sans spectateurs.
« Ancre » se nomme le nouveau clip de MC Jo Hell. Ancre, comme celle qu’on jette par-dessus bord. Le rappeur burgien aurait pu écrire « encre », comme celle qui noircit ses pages et ses idées. « Oui, il y a un double sens, sourit il dans sa barbe. Mais dans cette histoire de naufrage, c’est l’ancre qui t’entraîne au fond de l’eau. Cela traduit l’état d’esprit des artistes en ce moment ».
Punchlines cinglantes et désabusées
Que reste-t-il à ces saltimbanques médusés sur le radeau d’une culture en lambeaux ? Même pas la tristesse ni la peur. « Artiste triste, plus personne ne sait ce que ça veut dire. Est-ce celui qui a peur ? Mais avoir peur c’est croire ». Le texte est ainsi truffé de punchlines aussi cinglantes que désabusées. Genre : « Rien d’amusant à amuser les foules. Je me demande à quoi pense l’orchestre quand le bateau coule ». Ou bien : « On avait en ligne de mire un futur bien agencé. Je me retrouve seul face à mes doutes en me sentant bien malchanceux ».
MC Jo Hell a chiadé le fond (du gouffre). Il a aussi soigné la mise en scène avec les talents de son clan. Le Nantais Flubber assure comme un chef en producteur complice. Le vidéaste Victor Cointin réalise le clip capté dans le grand vide du Théâtre de Bourg-en-Bresse. « On est rentré en contact via Nico Galliot (NDR : ingé son et photographe). Ça s’est fait très simplement. Le Théâtre a été aux petits soins. Riton, un technicien, nous a accueillis avant que Nico prenne le relais ».
Public et artiste, comme deux amants séparés
Dans un noir et blanc classieux, la caméra tourne lentement autour du rappeur sur une musique lancinante. A peine brisé par des plans de coupe, ce ballet fascinant suggère l’artiste piégé dans sa boucle spatio-temporelle. A la fin, le plan s’élargit et passe en couleur. Effet saisissant. MC Jo Hell apparaît de dos face à une immense salle de spectacles sans spectateurs. « C’est comme quelqu’un que l’on perd, ou deux amants séparés. Le lien s’est rompu avec le public. On souffre de tout ça ». Un espoir ? C’est ce que signifie la couleur et l’ouverture de champ. Des possibles peut-être ?
Malgré l’absence de public, le final appelle les applaudissements. « On a eu envie d’en rajouter. Et puis on s’est dit non. Les applaudissements sont réservé à ceux qui militent pour l’ouverture de lits de réa. Pendant ce temps, il y a des gens qui meurent… »
Conclusion : franchement bien sous tous rapports. Monté par lui-même, « ce clip est celui dont je suis le plus fier » avoue MC Jo Hell. Il peut.
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