Une dream team du rock indé rend hommage au Velvet & Nico en relisant l’album « à la banane ». Têtes Raides publient leur nouvel opus, Bing Bang Boum. Deux visions du big bang et du chaos. Et au milieu, le Crock’n’roll décalé d’Eric « Chattos » Martelat.
I’ll Be Your Mirror : A tribute to the Velvet Undergound
Ne verra-t-on jamais le bout du souterrain de velours ? Une dream team du rock indé rend ici hommage au Velvet Underground (& Nico), à travers son œuvre séminale : le premier album « à la banane » pelée par Andy Warhol en 1967. « Ce disque ne s’est vendu qu’à 30 000 exemplaires. Mais chacun de ceux qui l’ont acheté ont fondé un groupe » disait Brian Eno en exagérant à peine l’onde de choc du big bang.
Miroir multi-facettes
Onze frères et sœurs, enfants ou petits-enfants naturels du Velvet en relisent les onze titres dans l’ordre et un soigneux désordre. Michael Stipe (REM) ouvre la session par un majestueux Sunday Morning mâtiné de Walk On The Wild Side.
En clôture, Iggy Pop façon I Wanna Be Your Dog, aboie European Song sur les guitares barbelées de Matt Sweeney. De la mélodie toxique au bruit blanc, deux des multiples facettes du Velvet.
Entre ces extrêmes, le casting impeccable explore et éclaire les méandres du labyrinthe. Rock brut, folk éthéré, planances psychés, divagations expérimentales… Chacun.e apporte son « tribute » avec son identité, sans trop s’éloigner du monolithe de peur de se perdre en route.
Femmes fatales
Pas plus que sur l’original, rien à jeter. Mais mention aux héritières de Nico. Femme Fatale sublimée au ralenti par Sharon Van Etten. Un étonnant All Tomorrows Parties sussuré/jazzé/vocodé par St-Vincent et le pianiste Thomas Bartlett. Ou l’entêtant I’ll Be Your Mirror lâché relax par Courtney Barnett, qui donne le titre de l’album et résume l’esprit de l’entreprise. Ce miroir qui renvoie notre image en dévoilant nos travers. Celui que l’on traverse pour accéder à la wild side.
I’ll Be Your Mirror : A tribute to the Velvet Undergound (Verve/UMG Recording). https://verve.lnk.to/IllBeYourMirrorID
Sunday morning toujours. Chaque dimanche matin ou à peu près, Eric «Chattos» Martelat croque l’actu en décalé, avec la verve rock’n’roll qu’on lui connaît.
Têtes Raides. Bing Bang Boum
Avaient-ils la banane en Têtes lorsqu’ils ont fondé leur groupe au milieu des années 80 ? Peut-être, pas sûr. Mais on ne voit pas comment ces fous de musiques auraient pu s’empêcher de toucher au fruit défendu. Toujours est-il que Têtes Raides livrent leur version du big bang et du chaos sur le bien nommé Bing Bang Boum.
En avant !
Ce nouvel album marque le retour de la formation « canal historique », enfin rassemblée après sept ans de mise en veilleuse. A la question de savoir si l’alchimie fonctionne encore, la réponse est oui, avec d’autres formules.
Témoin, cette ouverture menaçante, dissonante, implacable comme une marche de zombies. En avant ! Rythmique clopin-clopant sur laquelle se greffent un déluge d’instruments et la voix spectrale de Christian Olivier au milieu des éléments déchaînés. Magistral.
Les douze plages oscillent ainsi entre rock côté punk, ska musette, valses claudicantes ou flonflons ronflant à l’électricité, tout ça parfois au sein d’un même morceau, sans altérer la cohérence de l’ensemble. Gros travail de production signé Edith Fambuena, soit dit en passant.
Tiens, voilà que la vie se remet à flamber
Le fil rouge, c’est la danse et la poésie, ultimes actes de résistance et seules alternatives à l’apocalypse, ou tout au moins à l’happy collapse. « On va tous y passer, mais on aura dansé !» De l’incendie renaît l’énergie. « Tiens, voilà que la vie se remet à flamber ». Mais y a urgence. « D’autres mondes qui te tendaient les bras, j’espère que tu les énamoureras. Attention, ils ne passent qu’une fois ». Comme la musique, les mots toujours aussi énigmatiques se font plus durs, plus rentre-dedans. Plus Tom Waits que jamais, Christian Olivier les chante en français, franglais ou carrément en yaourt. Mais nul besoin de tout comprendre pour en saisir l’élan vital.
Face à face
Pas grand-chose à jeter là non plus. Notre préféré ? Face à Face. Sa petite musique addictive, sa rage pleine d’humanité et sa montée en puissance en font un missile de concert aussi dévastateur que l’Iditenté.
Car oui, le terrain de jeu privilégié de Têtes Raides reste la scène. Le public du Printemps de Pérouges a pu le constater récemment aux Trente ans de Ginette. Le vendredi 26 novembre à Ekinox/Parc Ainterexpo de Bourg-en-Bresse ce sera Bing Bang Boum. https://www.ainterexpo.com/
Bing Bang Boum (Jamais J’dégueule/BMG). https://www.alaniche.fr/